C’est lors du Béret-Baguette édition 2013 que nous avons eu la chance de rencontrer Daniel & Marcus Freitag, les fondateurs de la fameuse marque suisse qui recycle des bâches de camion et autres matériaux pour en faire des sacs uniques, résistants et fonctionnels. Avec près de 300 000 sacs vendus par an dans le monde entier, la marque est devenue incontournable, notamment chez les cyclistes à qui elle propose de nombreux modèles pensés pour être utilisés à vélo. C’est assis dans la pelouse autour d’un verre de vin que nous avons eu l’occasion d’en savoir un peu plus!
Photos par Ryosuke Kawai.
Daniel & Marcus Freitag / © Waicca
Bonjour messieurs, pouvez-vous rapidement vous présenter ?
Bonjour, moi c’est Daniel (Freitag, ndlr), j’ai commencé à créer des sacs à l’âge de 20 ans, et c’était il y a 20 ans déjà! Je suis le directeur créatif de Freitag, et je travaille à Zürich. Et voici mon frère Marcus, qui lui avait 21 ans quand on a commencé.
Comment a débuté l’aventure Freitag?
C’était en 1993, en octobre exactement, avec un premier sac, le F13 Top Cat. C’est un modèle qui se trouve dans la collection permanente du MOMA (Museum of Modern Art, ndlr) à New-York. Il est fait de cinq pièces de bâches différentes, un produit très simple. Ce modèle fait toujours partie de notre collection d’ailleurs! Il n’y avait pas vraiment de business plan au départ, ça a commencé avec un sac, puis deux, puis dix…
En 1996, j’ai entrepris de rallier Zürich à Oslo à vélo avec ce premier sac, pour le tester, puis j’ai rejoint San Fransisco. Sur place, j’ai contacté des cyclistes locaux en leur demandant d’être nos ambassadeurs. C’est aussi comme ça que la relation qui lie Freitag à l’univers du vélo a débuté.
Vous avez démarré avec un messenger bag il y a 20 ans, comment a évolué la gamme aujourd’hui et quelle est votre clientèle type ?
Le premier sac était très simple, dessiné selon nos besoins. Le premier vrai messenger bag que nous avons commercialisé, plus abouti, était d’avantage destiné à un public urbain, pas spécifiquement sportif, plus adulte peut-être…
De g. à d. : Niels, Val, Daniel, Marcus & Bozze / © Waicca
Avez-vous une idée de la surface totale de bâche (ou le nombre de bâches) utilisée depuis votre création ?
Si l’on mettait toutes les bâches qu’on utilise par an bout-à-bout, on pourrait quasiment atteindre la largeur de la Suisse du Nord au Sud, soit environ 100km. Chaque année, nous augmentons la production d’environ 20%, et il devient compliqué de trouver les bâches! Nous avons une équipe de cinq personnes dédiée à l’achat des bâches, notamment sur Internet. Mais nous sommes toujours à l’affut de jolies bâches sur les autoroutes!
Combien de messenger bags (disons le classique F12 Dragnet) peut-on découper dans une bâche standard ?
Nous pouvons réaliser entre 32 et 40 sacs dans une seule et même bâche…
Avez-vous déjà été tentés d’utiliser des matériaux « neufs » faute de stock ou simplement pour essayer ?
Non jamais. Du moins pas pour l’instant! Nous recyclons toujours. Quelquefois, certaines bâches ont l’air plus neuves que d’autres, car elles ont été moins utilisées. Un jour, mon frère m’a appelé alors qu’il était sur l’autoroute pour me dire « Hey, je viens de voir un camion accidenté sur le bas-côté, il avait une super bâche, il nous la faut! »
© Waicca
Des lancements de prévus bientôt? Quelles sont les nouveautés de la saison?
Nous essayons de lancer deux nouveaux produits chaque année, ou de nouveaux designs. En ce moment, nous sommes surtout occupés à ouvrir des magasins, les derniers étaient Lausanne, et avant Tokyo, New York et Vienne. Nous en avons 10 actuellement, principalement en Suisse et en Allemagne. Bientôt Paris j’espère!
Le projet de sac, objet ou accessoire que vous n’avez jamais osé concrétiser ?
Probablement un sac vraiment conçu pour le vélo, ou un sac de sport… Nous n’avons pas encore de valise non plus! Au niveau des matériaux, nous sommes assez limités puisque nous voulons vraiment conserver notre identité et notre philosophie de penser et agir en cycles et ne pas s’éparpiller. Nous préférons rester dans ce que nous savons faire pour l’instant, en essayant d’améliorer les techniques de fabrication ou en élargissant notre gamme actuelle.
Quel compliment / quel reproche vous fait-on le plus souvent sur les produits Freitag ?
Les gens aiment la qualité des matériaux, la fonctionnalité et l’imperméabilité, le « Made in Switzerland », et l’aspect « développement durable ». Tout est fabriqué en Suisse ou dans les pays limitrophes. Bien sûr, en Chine nous pourrions diviser nos coûts par 10, mais nous avons fait le choix de rester en Suisse. Notre principale manufacture, qui emploie 130 employés, est située au cœur de Zürich. C’est quelque chose d’important à nos yeux (un aperçu sur le site de Freitag, ndlr).
Au niveau des reproches, certaines personnes qui commencent à collectionner nos sacs nous accusent de ne faire que des modèles uniques… ;)
Stand Freitag – Caravane Béret-Baguette 2013 / © Waicca
Quel est votre rapport au vélo? Vous sentez-vous proche de ce « mode de vie » ? Vous roulez aussi ?
Nous aimons l’image véhiculée par le vélo, et nous sentons proche de cette philosophie. Nous roulons nous-mêmes dès que possible. Le vélo est le meilleur moyen de découvrir une ville. Dès que nous nous implantons dans une nouvelle ville, nous essayons de l’arpenter à vélo d’abord!
Vous voici au Béret-Baguette, à Paris, que pensez-vous de cet événement ?
Un événement comme celui-ci est un exemple parfait de ce que le vélo peut produire. Toutes les générations, toutes les communautés, réunies autour d’une seule et même passion. Nous avions vu l’excellente vidéo de l’édition précédente, et il fallait que l’on soit à celle-ci! C’est chose faite, nous sommes ravis, et nous reviendrons!
De g. à d. : Val, Daniel, Marcus & Bozze / © Waicca
Un avis sur l’évolution de la scène cycliste en Europe ces dernières années ?
Le vélo revient vraiment dans les mœurs, je ne pense pas que cela soit un effet de mode. Cela va dans le bon sens. Il faudrait maintenant que les villes s’adaptent un peu plus à cette pratique, et laissent plus de place aux cyclistes, notamment au niveau des infrastructures urbaines et des voies de circulation. Il reste beaucoup de choses à faire, mais restons confiants! Des événements comme celui-ci ne peuvent que nous conforter dans nos espoirs…
Un dernier mot pour la fin?
Merci pour cette entrevue (en français dans le texte, ndlr)!
Merci beaucoup messieurs! Et à l’année prochaine alors!